La prof et l’élève

Chanel Allister & Messiah Chomsky

Une soirée comme toutes les autres, à déambuler dans les rues, à la recherche de la tranquillité. Être seul est une chose particulièrement difficile le soir. Tu te demandes si tu vas pas t'éloigner de la ville, comme bien souvent. C'est une chose que tu fais la plupart du temps, à vrai dire, c'est le seul moyen que tu ais trouvé pour être tranquille un minimum. Une cigarette à la bouche tu avances, le regard bas, toujours, tu ne veux pas croiser le regard des autres, on dit toujours que le regard ne ment jamais, toute ta vie est un mensonge, tu ne veux pas que quelqu'un découvre ton secret, alors tu caches tes yeux, tu caches ton regard, tu caches tes secrets. De toute façon, il fait sombre, tu préfères quand il fait sombre. C'est beau la nuit, tu aimes bien quand il fait noir, toi, Mess, ça te permet de te sentir moins à jour, moins exposé aux gens, ton visage est caché par la pénombre et tu te sens plus en sécurité.

C'est à ce moment là, que tu la voit, elle. Elle à l'air de chercher quelqu'un, elle attend quelqu'un, c'est certain, un client. Elle est belle dans le noir, elle à l'air mystérieuse, son visage éclairé seulement par la lumière d'un lampadaire lui donne l'air d'une poupée de porcelaine. C'est beau la porcelaine, c'est fragile, délicat, précieux.

Tu dois jouer les hétéros, t'as toujours voulu peaufiner ton rôle, c'était le moment ou jamais. Pour que ton jeu de comédie soit parfait, tu dois savoir ce que ça fait de toucher une femme, de faire l'amour avec une femme. Ça te faisait peur, mais en même temps ça t'intriguait, qu'est-ce que les hommes aiment tellement chez les femmes. C'est complexe c'est joli parfois, c'est doux et lisse.

Tu stoppes ton observation et tu t'approches de la belle fille. "Bonsoir." Que tu lui dis avec un sourire. Tu sais très bien qu'il va falloir payer, c'est ça qu'elle veut, la fille, elle fait payer les hommes en échange de son corps. Mais est-ce que tu es réellement un homme? A cet instant, tu regrettes un peu de lui avoir parlé. Et si elle se moque de toi? Et si tu n'arrives à rien faire avec elle? Il faudra te forcer, pour faire comme si tu aimais ça. "Combien je dois payer?" Ça doit s'entendre dans ta voix hésitante que tu n'es pas rassuré.

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Elle sourit, c'est son rôle, probablement, si elle fait la gueule, elle ferait fuir tous les clients. Elle doit sourire à tout le monde. Toi tu restes là, les bras ballant, puis tu lui demandes le prix, en hésitant. Elle te répond, tu vas y laisser passer toutes tes économies du mois, c'est pas grave. C'est une expérience qui vaut le coup, le jeu en vaut la chandelle. Elle, elle hésite pas en tout cas, elle t’attrape la main et elle t’emmène dans un hôtel. Combien de chance y a -t-il qu'au même moment dans ce monde, un gay coincé se laisse traîner par une prostitué? Peu de chance, seulement toi probablement.

Dans la chambre, tu te laisses pousser sur le lit, tu t'arranges, sur le dos, allonger sur tes coudes, tu la regardes. Elle se déshabille. Ça te rappelle des mauvais souvenirs, l'époque où on essayait de te guérir, quand tu étais dans ce centre. Quand on te forçait à regarder des corps de femme nu pour te rendre "normal". Là c'est différent, tu la regardes de ton plein gré, tu veux essayer. Tu la quittes pas des yeux, tu te demandes si toi aussi tu dois te déshabiller, en théorie, oui, mais tes mains tremblotes trop pour ça. Tes yeux fixent son corps, tu la trouves jolie, mais c'est comme contempler une oeuvre d'art inconnue, une oeuvre d'art complexe, tu sais pas trop comment la regarder, tu sais pas comment t'y prendre, comment la manipuler.

Elle te demande de la laisser s'occuper de toi, tu veux bien, mais c'est une situation vraiment étrange, t'as pas l'habitude à la douceur, t'as pas l'habitude de voir ce genre de forme devant toi. T'as peur de passer pour un imbécile, un puceau, même si c'est pourtant bien la vérité, vierge avec les femmes, ou tout du moins vierge avec une fille de joie. Elle, elle a dû faire ça des millions de fois. Tout ce que tu trouves à dire c'est "Tu as un beau prénom." C'est vrai, c'est joli, Chanel, mais elle doit s'en fiche un peu. On dirait un adolescent de quinze ans en train d'essayer de draguer pour la première fois.

Avec un peu d’appréhension, tu t'assois sur le lit, en la regardant, presque timidement, c'est toujours un peu impressionnant. Tes mains soulèves ton sweat, pour enfin le retirer, c'est déjà un grand pas pour toi. Tu sais pas vraiment comment ça va se passer ensuite.

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Tu la complimentes, sur son prénom, c'est la seule chose que tu sais faire. Elle te remercie et elle te demande c’est quoi ton prénom. Tu te demandes si tu dois dire le vrai prénom ou alors t'en inventer un, par sécurité. Mais finalement, tu te dis que si tu fais tout ça c'est pour ton rôle d'hétéro. Alors si il faut que ça se sache, ça se saura, que Messiah a couché avec une fille, une prostitué, en plus. Ça peut faire bien pour ta réputation, ça. Alors tu craches le morceau. "J'm'appelle Messiah". Après, tu regrettes, si ça se traduit par une catastrophe, tout le monde saura que c'est toi. Intérieurement, tu pries pour que tout se passe bien et que tu arrives à gérer. Sinon, c'est la honte pour toi et tout le monde saura que finalement, t'es pas guéri. Si ça remonte jusqu'aux oreilles de tes parents, t'es bon pour retourner là-bas, dans ce centre pour les "malades gay".

Finalement, tu enlèves ton sweat, tu trouves ça gênant, c'est tellement plus facile avec un garçon. Elle te demandes si tu fais souvent ce genre de chose, t'es grillé, Mess, ça y ai. Ça se voit que tu sais pas faire, ça se voit que tu gères pas avec les filles. Encore une fois tu te demandes si tu dois dire la vérité et être honnête ou pas. Si tu fais celui qui s'y connait et qui l'a fait des millions de fois, tu risques de te ridiculiser monumentalement et ça sera le drame. "Euh.. non, j'ai pas l'habitude." Tu passes pour un coincé, mais au moins elle s'attend pas a un truc exceptionnel et elle est prévenu, elle tombera pas de trop haut, et ta médiocrité ne l'étonnera pas.

Elle glisse une main sous son t-shirt, t'étais prêt à te sauver, c'est trop bizarre, c'est trop inconnu pour toi et ça te rassures pas. C'est tellement différent d'une main de garçon. Elle te chuchote qu'elle va pas faire de mal. Heureusement. Tu lèves les yeux vers elle, t'as l'air un peu paniqué, tu sais pas trop quoi faire, tu sais pas trop où tu dois poser tes mains, tu oses pas trop la toucher, c'est intimidant pour toi. Alors tu poses une main sur son bras, tu oses pas trop toucher le reste, trop inhabituel pour toi. L'embrasser ça tu peux le faire, tu as embrassé Télarose des millions de fois devant tes parents, devant les autres pour leur faire croire que t'es hétéro, embrasser une fille, ça tu gères, alors tu le fais. Tu souris un peu et tu l'embrasses, c'est le seul truc que tu sais faire avec une fille.

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Chanel Allister & Messiah Chomsky

Tu la laisses faire, tu la regardes faire, elle prend ta main et elle la pose sur son sein. C'est bizarre pour toi, c'est étrange, c'est nouveau, pas déplaisant mais nouveau. Tu laisses ta main posée dessus, tu oses plus trop bouger ta main, tu la laisses immobile. Elle t'embrasse, ça tu sais faire, tu prolonges lentement le baiser, les yeux fermés. C'est toujours bizarre au début, ce sont des choses que tu as déjà fait, que tu sais faire, mais tu as l'impression de le redécouvrir à chaque fois.

Ça se sent que tu es pas rassuré et nouveau dans ce domaine. Elle se recule et elle te dit de la regarder, de haut en bas. Au début, tu oses pas, tu baisses les yeux, tu baisses la tête comme à chaque fois. Mais finalement, tu te laisses aller, puis tu fais ce qu'elle te dit, tu la regardes, de haut en bas. Elle a raison, tu le verras pas ça tous les jours.

Elle te demande si tu en as déjà vu, des femmes nues, bien sûr que tu en as vu, des milliers même, quand tu étais en train de te faire soigner on te forçait à regarder des photos de femmes nues pour te guérir. "Oui j'en ai déjà vu, plein." Tu t'efforces de chasser tous ces mauvais souvenirs, tu veux bien regarder des femmes, mais uniquement quand tu le veux, c'est toi qui décide, tu veux pas être forcé à le faire pour soit-disant guérir ton homosexualité. Là, tu regardes Chanel, de ton plein gré, c'est totalement différent et tu apprécies beaucoup mieux. "Tu es belle." que tu lui dis, c'est vrai, il faut reconnaître ce qui est beau. Regarder, c'est une chose, mais t'en occuper, c'est autre chose, est-ce que tu vas savoir le faire? Est-ce que ça va te plaire? Tu en sais rien, mais tu veux essayer, pour savoir, apprendre, découvrir. T'as envie de découvrir avec tes mains aussi, tu lui dis "Viens."